Phu Quoc, une île au Vietnam
Bientôt un paradis perdu?Phu Quoc promet d’être un carnage urbanistique. Pour le moment, c’est encore un paradis, mais l’urgence est là.
Contrairement aux nostalgiques photographies avant / après de villes que nombre se plaisent à partager, cette île du Golfe de Thaïlande est un instantané de la phase intermédiaire. Voici le “pendant” et le “comment”.
D’un côté, vous avez donc ce sentiment de lointain, de nature à l’état brute, de villages bouillonnants. On se déplace en scooter sur les pistes en terre rouge, ça klaxonne de tous les côtés. Le Vietnam étant en pays dense, ne pas s’attendre à une campagne douce, agrémentée de quelques fermettes de ci de là. Le bâti se concentre en plusieurs petits bourgs, tous très animés avec leurs marchés, leurs gargotes où grignoter.. Dans la ville principale de Duong Dong, les maisonnettes et habitations de fortune sur pilotis se suivent.
La succession de palmiers cache quelques plages de sable fin. Le tableau pourrait sembler idyllique.
Puis, voici l’aéroport international de Phu Quoc, vide, tant il est sur-dimensionné par rapport au tourisme de niche actuel. Le long de la route de la côte, la publicité en russe pour les perles de culture commence. Ce que l’on croyait être un chemin tortueux commence à être asphalté. Là, un parc d’attraction à vomir, rose, kitsch, qui a ruiné la côte. On ferme les yeux en espérant un mirage. Et puis, c’est la succession d’hôtels de luxe. Tous les grands groupes y sont, les étoiles s’accumulent.
En chantier, blocs de béton pour l’un, début de structure pour l’autre. Les affiches de promoteurs donnent une idée de l’ampleur du projet. Pas d’éco-resort de luxe intégré à son environnement, on y va à pelleteuse, tours arrogantes en prime. La petite route a été supprimée pour permettre d’agrandir la plage. Derrière, une autoroute se met en place.
Tout le charme de l’île partira en fumée sous couvert de manne financière touristique. Sans tenir compte de la beauté intrinsèque du lieu, en enlevant ce qui fait sa rareté: ses grands espaces, ses plages désertes. Voici donc un nouvel ersatz des plages populaires turques, espagnoles, mexicaines. Toutes interchangeables, toutes vidées de leur substance. Tandis qu’un développement intelligent et durable aurait pu être possible.
D’ici la finalisation de ces chantiers, il est encore temps d’en profiter. De dormir chez l’habitant ou dans des petites pensions qui n’ont certes pas de petit déjeuner continental, mais font que l’on se sent au Vietnam, quand nous sommes au Vietnam (c’est bien le but du voyage?).
Louez un scoot’, partez à l’aventure sur les sentiers. Allez faire de la plongée et observer les poissons multicolores. Attablez-vous dans les grands restaurants de poisson. Commandez en observant ce que mangent vos voisins ou en montrant du doigt le poisson vivant que vous voulez avoir grillé. Régalez-vous de plats relevés à la sauce de poisson, à la citronnelle et au citron vert dans un brouhaha dynamisant.
Passez au marché, sirotez un café dans une ruelle, regardez la ville s’agiter, et profitez, ça ne va pas durer.